Crash du mont Sainte-Odile : pour les rescapés l’impossible oubli
Crash du mont Sainte-Odile : pour les rescapés l’impossible oubli
Crash du mont Sainte-Odile, le 20 janvier 1992.
Miraculés
« Impossible d’oublier » : miraculés du crash d’un Airbus A 320 sur le mont Sainte-Odile, Le 20 janvier 1992, Romain, Claude et sa fille Mélissande sont marqués à vie.
Romain Ducloz
« J’ai essayé d’effacer, mais ça n’est pas possible », confie Romain Ducloz, 38 ans aujourd’hui, 8 au moment du drame. « C’est quelque chose qu’on ne peut pas oublier, c’est impossible », abonde, Claude Cohana, 62 ans.
Erreur
Une erreur de pilotage serait la cause déterminante de la catastrophe. Le BEA (Bureau Enquête Analyse) a retenu comme hypothèse la plus probable une erreur de programmation du pilotage automatique par l'équipage qui l'aurait induit en erreur au moment de l'amorce de la descente et de la mise de l'appareil dans l'axe de la piste d'atterrissage.
BEA
Le BEA a également mis en cause le système de navigation (VOR), un manque de clarté des informations et un non-respect des procédures du contrôleur aérien militaire, et l'absence d'une alerte de proximité du sol (GPWS) dont étaient alors dépourvus les avions d'Air Inter.
Catastrophe
Après cette catastrophe du Mont Saint-Odile, la présence d'une balise de localisation d'urgence, à déclenchement automatique en cas de crash, est devenue obligatoire à bord de tous les avions commerciaux.
Ergonomie
L'ergonomie de l'affichage du tableau de bord a été modifiée sur les Airbus pour prévenir une nouvelle erreur de pilotage liée à une mauvaise lecture des cadrans. Tous les avions sont désormais équipés d'un système GPWS.
Commandant
Le commandant de bord avait 42 ans et comptabilisait 8 800 heures de vol, dont plus de 160 aux commandes d'un A 320. Le co-pilote avait 37 ans et 3 600 heures de vol à son actif. Lui aussi avait déjà navigué aux commandes de cet appareil.
Avion
L'A 320 entre en service en 1982. C'est un avion hautement informatisé, ce qui est une nouveauté technologique pour l'époque. Cette innovation permet alors à Airbus de devancer l'industrie américaine. L'A 320 est présenté comme un appareil très facile d'utilisation et d'une grande fiabilité, car l'ordinateur est considéré comme plus sûr que l'esprit des pilotes.
Électronique
L'électronique a priorité sur l'action des pilotes dans la navigation de l'avion. L'avion qui s'est écrasé avait été révisé le matin même de son crash, sans qu'aucune anomalie ne soit détectée.
La localisation de l'appareil s'avère extrêmement compliquée en rouge, le lieu exact du crash de l'A320. On constate l'éloignement des différentes routes qui sillonnent le secteur. • © google maps.
Signal
Dix minutes après la perte du signal de l'avion, des plans d'urgence sont déclenchés par la préfecture et l'Armée. Mais la localisation de l'appareil s'avère extrêmement compliquée : il s'est écrasé en pleine colline boisée, de nuit, dans le brouillard, loin de tout habitat et à 1500 mètres de toute voie carrossables, et la balise Argos de l'avion a été détruite dans l'accident.
Civils
Ce sont des civils et un journaliste qui découvrent le lieu du crash, trois heures après l'accident. Les gendarmes arrivent enfin sur site vers 22 h 30.
Rescapés
Les rescapés sont évacués ou médicalisés sur place. Car l'accès au site est difficile : les voies d'accès sont en mauvais état, étroites, et encombrées par de nombreux véhicules de curieux venus voir ce qu'il se passait.
Météo
Les conditions météo compliquent encore les interventions : la température est de -5°, il y a du vent, il neige et la zone est en plein brouillard.
Évacués
Les rescapés ne sont évacués vers les hôpitaux qu'aux alentours d'1 h 30 du matin. Il s'est écoulé 4 h 30 entre le crash et l'évacuation vers les hôpitaux. Certains rescapés sont morts durant ce laps de temps.
Les rescapés sont évacués ou médicalisés sur place.© M. Lerch / Maxppp.
Survivants
Romain, Claude et sa fille Mélissande, 13 mois à l’époque, font partie des neuf survivants de cet accident qui a coûté la vie à 87 passagers et membres d’équipage dans le massif des Vosges.
Romain
Ce 20 janvier, Romain rentrait seul en avion pour rejoindre sa mère à Strasbourg après un séjour chez son père à Aix-en-Provence. Claude, elle, rendait visite avec son bébé à ses parents, près de Strasbourg.
Avion
« Mon premier avion avait atterri en retard à Lyon en fin d’après-midi », se souvient Romain, qui avait grimpé in extremis dans l’A 320 d’Air Inter (absorbée en 1997 par Air France) à destination de Strasbourg-Entzheim.
« Je me suis retrouvé à l’arrière. Normalement, les enfants seuls sont à l’avant », se souvient-il. Cela lui sauvera la vie : la quasi-totalité des rescapés était dans la queue de l’appareil.
Décollage
Après le décollage, « j’ai assis Mélissande à côté de moi », explique Claude. « Lorsqu’on nous a annoncé qu’on allait atterrir, je lui ai remis sa combinaison, je l’ai bien ceinturée. Je pense que ça lui a sauvé la vie, si je l’avais eue dans les bras, je l’aurais perdue ». Je croyais qu’on atterrissait. En fait, on tapait la cime des arbres.
Vol
Le vol se déroule normalement, jusqu’à la descente sur l’aéroport d’Enztheim : « Ça faisait comme sur la piste d’atterrissage, avec de petits sursauts, je croyais qu’on atterrissait. En fait, on tapait la cime des arbres », se souvient, Claude. Puis, subitement, « des rayures noires, grises un froid glacial, l’odeur du kérosène » : l’avion s’est fracassé contre la montagne.
Connaissance
Elle perd connaissance. « Quand j’ai ouvert les yeux, on était à ciel ouvert, j’étais sur mon siège. J’ai entendu ma fille pleurer, je pense qu’elle a eu très peur, même si, à 13 mois, on ne réalise pas ».
Réminiscences
« Il y a des formes de réminiscences », nuance Mélissande, 31 ans, qui n’a aucun souvenir du crash, mais confie avoir gravi une fois « le mont Sainte-Odile, de nuit, avec de la neige J’avais envie de m’enfuir ».
Zone
« Tout au fond, il doit y avoir quelque chose, mais je ne peux pas y avoir accès. Une zone de ma mémoire interdite pour l’instant », avance cette assistante juridique dans un cabinet d’avocats lyonnais.
Crash
Après le crash, au milieu des gémissements des autres rescapés, Pierre Lota, assis près de Romain, l’aide à s’extirper de ce qu’il reste de la carlingue, deux autres survivants émergent bientôt « de la carcasse », relate Romain : Nicolas Skourias, « avec, dans les bras, une hôtesse de l’air ».
Fractures
Claude, qui souffre de multiples fractures, se laisse glisser avec Mélissande hors de la carlingue : « Je n’arrivais pas à marcher, j’ai rampé », indique l’ancienne policière, en invalidité depuis l’accident.
Attente
Commence alors, dans les débris, le froid et la neige, l’interminable attente des secours, dont les délais d’intervention ont tant scandalisé survivants et proches des victimes : plus de quatre heures pour retrouver le lieu du crash.
Secours
On apprendra plus tard que six personnes décédées auraient pu survivre si les secours étaient intervenus plus rapidement.
Nuit
« Il faisait nuit, il y avait du brouillard, on avait très froid », explique Romain. Pierre et Nicolas s’occupent des rescapés, tentent de chercher de l’aide.
Réconfort
« Ils nous ont donné beaucoup de réconfort ». Vers 23 h 30, les blessés sont évacués vers les hôpitaux du secteur. « Trois jours plus tard » Romain retourne à l’école, « Tout le monde connaissait mon histoire. C’est là que j’ai réalisé ce qui m’était arrivé, avec le regard des autres ».
Crash
Le crash, Mélissande l’a découvert par sa mère, dont elle ne comprenait pas pourquoi elle était « plâtrée » et avait des « béquilles ». « Je lui ai expliqué quand elle avait 4 ou 5 ans », raconte Claude.
Vie
« On est en vie, je suis un peu cassée, mais ce n'est pas grave ». Mélissande, qui ne se souvient de rien, estime avoir eu une vie « normale ». Mais lorsqu’elle regarde des reportages sur le drame, elle « découvre à chaque fois ce que les autres savent déjà. C’est très impressionnant ».
Claude
Claude a rarement repris l’avion, quand sa fille dit n’avoir aucune « phobie ». Récemment, il a arrêté de demander à être placé à l’arrière, « un grand pas pour moi ».
Terrorisé
Longtemps terrorisé par la montagne, il est même devenu un passionné de snowboard et gère un magasin de ski à La Plagne. Une façon de « dompter la montagne », comme le lui a suggéré une « psy ».
Continue
Mais, 30 ans après, il continue de penser « aux familles des victimes et à cet accident, ca fera toujours partie de ma vie ». C’est comme ça conclut-il.
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